La petite histoire de la Coupe du Monde 2019

La huitième Coupe du Monde féminine de football a eu lieu, comme vous le savez très sûrement, en France, l’été dernier. A l’issue de la finale, qui se tenait à Lyon le 7 juillet dernier, les Américaines sont devenues pour la seconde fois consécutive championnes du monde, en battant les Pays-Bas (2-0). Retour sur la préparation de cette Coupe du Monde 2019, son déroulé tour par tour et les retombées possibles des suites de cet évènement à l’importance grandissante.

C’est le 6 mars 2014 que la FIFA annonce l’ouverture officielle des candidatures pour l’organisation de la Coupe du Monde Féminine de la FIFA 2019. Le 19 mars 2015, le comité exécutif de la FIFA attribue à l’unanimité l’organisation du tournoi à la France. Pour la première fois, la France accueille le Mondial sur son sol, après avoir organisé la Coupe du Monde masculine en 1938 et en 1998. Le logo choisi pour la compétition reprend la forme du trophée de la Coupe du Monde, surmonté par un ballon entouré de huit fragments de lumière, symbolisant la huitième édition. Il fait allusion à plusieurs icônes culturelles françaises. La mascotte, elle, est un jeune poussin nommé Ettie, signifiant “étoile”, en référence au coq gaulois et au fameux Footix.

Onze villes étaient initialement candidates pour recevoir des matches de cette compétition. Auxerre et Nancy ne sont pas retenues. Initialement proposé, le Stade Jean Bouin a finalement été remplacé par le Parc des Princes. Trois des stades ont été utilisés durant l’EURO 2016 : le Parc Olympique Lyonnais, l’Allianz Riviera Parc des Princes. Ce dernier a été utilisé en 1998, comme le Stade de la Mosson. Les autres stades peuvent accueillir moins de 30.000 spectateurs. Interrogé sur l’attribution au même stade (celui de Lyon) des deux demi-finales et de la finale, la FIFA a indiqué vouloir offrir “une forme de reconnaissance pour le travail de l’Olympique Lyonnais et de Jean-Michel Aulas en faveur du football féminin”. L’absence de match au Stade de France s’expliquerait, elle, par les relations compliquées qu’entretiendrait la FFF avec le Consortium Stade de France, en raison du coût du contrat signé entre les deux parties pour l’organisation des matchs des hommes.

La Coupe du Monde 2019 participe à la promotion du football féminin. Lors de la dernière édition, organisée au Canada en 2015, 1.35 million de spectateurs avaient été comptabilisés dans les différents stades sur l’ensemble de la compétition. En choisissant la France, pays où le football féminin est en plein développement, la FIFA espère qu’un nouveau record d’affluence sera atteint. Au niveau des audiences TV, tout est bien entendu encore plus important. La FIFA espère dépasser le stade symbolique du milliard de téléspectateurs. Du côté de la FFF, la Coupe du Monde doit permettre de donner un coup d’accélérateur au plan de féminisation du football français qui a été lancé en 2011. La Fédération espère dépasser le cap des 200.000 licenciées en 2020.

PHASE DE POULES

POULE A : La France et la Norvège font office de favoris du groupe A. Lors de leur premier match, elles étalent toutes deux leur puissance offensive, en s’imposant respectivement 4-0 et 3-0 face à la Corée du Sud et au Nigeria. Elles s’affrontent ensuite lors du deuxième match. Les Bleues s’imposent finalement 2-1 et prennent la première place du groupe. Lors du dernier match, elles consolident leur première place en s’imposant 1-0 contre le Nigeria. De leur côté, les Norvégiennes assurent leur deuxième place en battant les Coréennes 2-1. Le Nigeria termine troisième et la Corée du Sud quatrième.
POULE B : L’Allemagne fait office de grande favorite. L’outsider du groupe est l’Espagne, nation où le foot féminin est en constante progression. Le pays a disputé sa première Coupe du Monde en 2015 mais avait été éliminé dès la phase de poules. Lors du premier match, l’Allemagne s’impose difficilement face à la Chine 1-0. L’Espagne s’impose également en toute fin de match face à l’Afrique du Sud 3-1, après avoir été mené 1-0. Les deux nations s’affrontent lors du deuxième match. Malgré une domination dans la possession, les Espagnoles s’inclinent finalement 1-0 face aux Allemandes. Lors du dernier match, les Allemandes assurent leur première place en disposant facilement des Sud-Africaines 4-0. L’Espagne termine deuxième place et avec quatre points, la Chine termine troisième et se qualifie également pour les huitièmes de finale.
POULE C : Le Brésil fait office d’épouvantail. Néanmoins des doutes subsistent concernant sa capacité à aller loin dans la compétition. L’Australie, elle, espère enfin passer le stade des quarts de finale d’une Coupe du Monde, après trois éliminations consécutives en 2007, 2011 et 2015. L’Italie retrouve la Coupe du Monde, vingt ans après sa dernière participation. Enfin, la Jamaïque, participe pour la première fois de son histoire. L’Italie réalise un petit exploit en battant l’Australie 2-1 grâce à un but en toute fin de match. De son côté, le Brésil dispose facilement de la Jamaïque grâce un triplé de son attaquante Cristiane mais perd ensuite lors de son deuxième match face à l’Australie 3-2, après avoir pourtant mené 2-0. Pendant ce temps, l’Italie assure sa qualification en huitième finale en battant la Jamaïque. Lors de la dernière journée, le Brésil bat l’Italie. De son côté, l’Australie assure sa qualification en battant la Jamaïque 4-1. Par ailleurs, en marquant le penalty face à l’Italie, la brésilienne Marta atteint le total de dix-sept buts marqués en Coupe du Monde, et dépasse l’allemand Miroslav Klose.
POULE D : L’Angleterre et le Japon ont connu des difficultés à tenir leur rang tout en assurant l’essentiel. Tandis que les Anglaises sont difficilement venues à bout de l’Écosse (2-1), le Japon est contraint au match nul par une équipe argentine irréprochable en défense (0-0). La seconde journée voit le Japon s’imposer difficilement contre l’Écosse (2-1), tandis que l’Angleterre ne l’a emporté un peu plus tard dans la soirée que d’une courte tête face à des Argentines héroïques défensivement. Lors de l’ultime journée, le Japon, qui avait besoin d’une victoire pour terminer en tête du groupe tandis que l’Angleterre pouvait se contenter mathématiquement d’un match nul, est battu par son adversaire d’un soir (0-2). Dernière du groupe avec un point, l’Écosse est éliminée.
POULE E : L’entrée en matière des deux favorites du groupe E, le Canada ainsi que les Pays-Bas, est relativement délicate. Les hôtes du Mondial 2015 et médaillées de bronze aux Jeux Olympiques 2012 et 2016 ne l’emportent que sur la plus petite des marges face au Cameroun. Les championnes d’Europe 2017 s’imposent sur le même score le lendemain face à la Nouvelle-Zélande. Les Pays-Bas écartent ensuite le Cameroun 3-1, tandis que le Canada dispose de la Nouvelle-Zélande sur le score de 2-0. Avec six points au compteur, la qualification pour les huitièmes de finale est assurée. Les Pays-Bas, qui n’avaient besoin que d’un point pour terminer en tête grâce à un plus grand nombre de buts marqués, frappent un grand coup en battant le Canada (2-1). Le Cameroun termine parmi les quatre meilleurs troisièmes.
POULE F : Lors de leur premier match, les États-Unis, championnes du monde en titre et grandes favorites de la compétition, écrasent la Thaïlande 13-0, grâce notamment à un quintuplé d’Alex Morgan. Peu de temps avant, les Suédoises étaient venus à bout des Chiliennes 2-0. Lors de leur deuxième match, les États-Unis et la Suède poursuivent leur sans-faute en battant respectivement le Chili 3-0 et la Thaïlande 5-1, ce qui leur permet de se qualifier pour les huitièmes de finale. Les deux formations s’affrontent ensuite dans un match ayant pour seul enjeu la première place du groupe. Les États-Unis s’imposent 2-0.

HUITIÈMES DE FINALE

Lors du premier huitième de finale, l’Allemagne dispose facilement du Nigéria (3-0). Les doubles championnes du monde se montrent efficaces en inscrivant deux buts en première période, par l’intermédiaire d’Alexandra Popp sur corner et de Sara Däbritz sur penalty. Sur un ballon perdu, les Allemandes inscrivent même un troisième but en fin de match par Lea Schüller.

Le deuxième huitième de finale entre la Norvège et l’Australie est longtemps indécis. Bousculées, les Norvégiennes se reprennent ensuite et ouvrent le score par l’intermédiaire d’Isabell Herlovsen. En seconde période, les Norvégiennes ne parviennent pas à inscrire un second but pour se mettre à l’abri et sont finalement rattrapées en toute fin de match par les Australiennes sur un corner direct d’Elise Kellond-Knight. En prolongations, les deux équipes ne parviennent pas à marquer et doivent se départager aux tirs au but. La Norvège l’emporte finalement, 4 tirs au but à 1.

Le troisième huitième de finale voit les Anglaises battre logiquement les Camerounaises sur le score de 3-0. Dominatrices dans la possession, les Anglaises ouvrent le score sur un coup-franc indirect de Stephanie Houghton, puis doublent la mise par Ellen White. Alex Greenwood parachève finalement le succès anglais en inscrivant un troisième but après une combinaison sur corner.

Le quatrième huitième de finale voit la France battre difficilement le Brésil 2-1 après prolongation. Après une première période pauvre en occasions, les Bleues ouvrent le score en seconde période par l’intermédiaire de Valérie Gauvin après un débordement et un centre de Kadidiatou Diani. Les Brésiliennes égalisent peu de temps après par Thaisa. Les deux équipes ne parviennent pas ensuite à se départager et sont contraintes de disputer les prolongations. Sur un contre, les Brésiliennes ont l’occasion de prendre l’avantage mais la défenseure française Griedge Mbock sauve le ballon sur sa ligne, avant qu’Amandine Henry ne marque le but victorieux.

Le cinquième huitième de finale devait déterminer qui des Etats-Unis et de l’Espagne affronterait la France en quart de finale. Les Américaines démarrent fort et obtiennent rapidement un penalty, transformé par Megan Rapinoe. Trois minutes plus tard, les Espagnoles réagissent et égalisent par Jennifer Hermoso, qui profite d’un mauvais dégagement. À un quart de l’heure de la fin, les Etats-Unis obtiennent cependant un deuxième pénalty. Megan Rapinoe le transforme à nouveau et permet aux Etats-Unis de s’imposer finalement 2-1.

Le sixième huitième de finale entre la Suède et le Canada est longtemps indécis.Stina Blackstenius ouvre le score pour la Suède en début de seconde période. Les Canadiennes réagissent ensuite et obtiennent un penalty, détourné par la gardienne suédoise. Le score ne bouge plus par la suite et les Suédoises se qualifient pour les quarts de finale.
. Le septième huitième de finale entre l’Italie et la Chine est disputé. Le début de match est dominé par les Italiennes qui ouvrent logiquement le score après un quart d’heure de jeu par Valentina Giacinti. En seconde période, les Italiennes reprennent possession du ballon et doublent rapidement la mise par Aurora Galli, pour au final se qualifier.

Le dernier huitième de finale voit les Pays-Bas battre difficilement le Japon 2-1 au terme d’un match animé. Les Néerlandaises ouvrent le score par Lieke Martens, sur corner. Les Japonaises réagissent aussitôt et égalisent deux minutes avant la pause par Yui Hasegawa. La seconde période est initialement équilibrée, mais voit petit à petit le Japon prendre l’ascendant sur le plan technique et obtenir plus d’occasions franches que des Bataves en proie au doute. À deux minutes de la fin, les Néerlandaises obtiennent finalement un penalty. Lieke Martens le transforme et permet aux Pays-Bas de se qualifier pour les quarts de finale.

QUARTS DE FINALE

A l’occasion des quarts de finale, l’Angleterre se débarrasse facilement d’une Norvège en pleine reconstruction, sur le score de 3-0, grâce encore une fois à Lucy Bronze et Ellen White, décisives sur chaque but inscrit. Les Pays-Bas confirment leur statut de Championnes d’Europe en écartant facilement l’Italie (2-0), tandis que la Suède crée la surprise en éliminant l’Allemagne (2-1). Au Parc des Princes, la France fait face à l’ogre américain. Rapinoe, encore elle, ouvre rapidement le score, avant de doubler la mise en milieu de seconde période. Les Bleues réagissent trop tard, par l’intermédiaire de Wendy Renard (son quatrième but de la compétition) sur corner. L’expérience a parlée.

DEMI-FINALES

Les Américaines font boire la tasse aux Anglaises (2-1) après un match très intense et disputé, se qualifiant pour la cinquième finale de Coupe du Monde de leur histoire, un record.
Elles ont commencé très fort et très vite avec un but dès la onzième minute de Christen Press, d’une tête côté gauche. Les Anglaises n’ont pas démérité et égalisé rapidement par White, sur un centre de Walsh. A la demie-heure, Morgan a offert un nouveau but d’avance aux siennes sur une tête. Les Anglaises, qui rêvaient de la première finale de leur histoire après leur troisième place il y a quatre ans échouent de nouveau en demi-finale, comme en 2015 et comme lors de l’EURO 2017. Les Pays-Bas battent elles la Suède 1-0 après prolongation le lendemain et se qualifient pour la première finale de Coupe du Monde de leur histoire. L’unique but de la partie a été inscrit par Jackie Groenen à la 99e minute, qui a ainsi offert aux lauréates de l’EURO 2017 un duel face aux Américaines.

FINALE

Alors que la Suède termine troisième après sa victoire contre l’Angleterre (2-1), à Lyon, les États-Unis deviennent pour la quatrième fois de leur histoire Champions du Monde après avoir battu les Pays-Bas (2-0) lors de la finale. Un penalty de Megan Rapinoe et un but de Rose Lavelle ont eu raison des Néerlandaises, qui auront cédé en seconde période après avoir bien résisté. Les Américaines d’Alex Morgan remportent ainsi un deuxième sacre mondial d’affilée.

On sait que cette Coupe du Monde féminine est la plus regardée de l’histoire. Les audiences de la compétition, lancée en 1991, n’ont cessé de monter ces dernières années. La FIFA a annoncé plus d’un milliard de téléspectateur. En Russie, en 2018, lors de la Coupe du Monde masculine, ils étaient 3.572 milliards. Plusieurs records d’audience ont été battus à la télévision française et à l’étranger. L’affiche des Bleues en huitièmes de finale face au Brésil a réuni près de douze millions de personnes sur TF1 et Canal+. Avec cet engouement inédit, TF1 a même réajusté à la hausse ses tarifs publicitaires pendant la compétition. La demi-finale Etats-Unis-Angleterre a été la plus forte audience télévisée de l’année au Royaume-Uni, avec 11.7 millions de personnes devant la BBC.

Le succès a aussi été au rendez-vous dans les stades. Le Mondial a affiché un taux de remplissage moyen de 74% des sièges dans les neuf villes hôtes. Tous les matchs de l’Équipe de France ont été disputés à guichets fermés. Si l’organisateur avait annoncé que les deux demi-finales à Lyon avaient fait le plein, quelques places étaient vides dans les tribunes. Quant à la finale dans la capitale des Gaules, avec 57.900 spectateurs, elle a marqué un record d’affluence historique en France pour un match de football disputé par des femmes (mais encore loin des 90.185 personnes lors de la finale du Mondial féminin de 1999, aux Etats-Unis). La Coupe du Monde n’a pas rempli les bars, ni les rues. En semaine, les “fan zones” de la FIFA avaient même du mal à attirer du public, plus familial et porté vers les visites. Certains Américains, deuxièmes plus grands acheteurs de billets, étaient déçus de l’ambiance générale et déploraient le manque de visibilité de l’événement en dehors des gares et des aéroports. Autre public en nombre et remarqué, les Néerlandais ont animé toutes les villes où les Championnes d’Europe ont évolué. Ils défilaient par exemple derrière un bus à impériale en chantant et dansant et étaient accompagnés d’une fanfare dans les stades.

Certains veulent voir cette Coupe du Monde comme un tournant pour la pratique féminine. Elle l’est pour plusieurs pays. L’Afrique du Sud va lancer sa première ligue féminine nationale, les Australiennes ont obtenu que le salaire de base dans leur championnat soit le même que celui des hommes. Plusieurs sélectionneuses ont appelé au développement du football féminin dans leurs pays à tous les échelons. Après de tels records d’audience et d’affluence en France, la grande inconnue est de savoir si l’engouement va se poursuivre en D1. L’entreprise de chimie Arkema s’est offert le naming du championnat pour trois ans. Sur la saison 2018-2019, l’affluence moyenne était modeste (environ 900 spectateurs). Quant aux Bleues, privées des Jeux de Tokyo 2020 pour avoir manqué de terminer parmi les trois meilleures équipes européennes, elles risquent de trouver le temps long. Si elles ont pu évoluer dans des stades pleins durant ce Mondial, les matches de qualification pour les prochains Championnats d’Europe ou matchs amicaux seront de véritables tests. Le groupe M6 a, par ailleurs, décidé de basculer les rencontres des Bleues sur sa chaîne principale. Auparavant, elles étaient diffusés sur W9, regardées seulement par les puristes.

Longtemps décroché vis-à-vis des pays précurseurs en la matière, englué dans un certain conservatisme, le football français a entrepris de combler son retard à marche forcée. Depuis 2011, le plan de féminisation de la Fédération française de football (FFF) a porté ses fruits. En huit ans, le nombre de licenciées est passé de 86.000 à presque 180.000 au dernier pointage. Celui des dirigeantes de 25.000 à 40.000 et celui des éducatrices de 1.500 à 3.50 Sur l’ensemble du territoire, 3.035 clubs sur environ 16.000 possèdent désormais au moins une équipe féminine. En attendant les chiffres officiels, on peut être certains que les prévisions de licences seront dépassées.

Ivan GADAY

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