Interview de Cécile Cadier

Cécile Cadier est professeure d’EPS au sein du collège Camille Claudel Civray. Elle revient pour nous sur les origines de sa passion pour ce métier, nous parle du rôle du professeur et évoque les récents excellents résultats du collège en Sport Partagé.

 

Cécile, pour commencer, comment est né votre rapport avec le sport ?

Mon rapport avec le sport est né assez tardivement car mes parents n’étaient pas sportifs et ne m’ont pas amené à découvrir le monde fédéral. Mon envie, mon plaisir du sport sont venus via l’EPS, au collège. D’ailleurs, ma vocation actuelle date de ma classe de quatrième. J’ai ensuite demandé à faire du sport seule sur mes années collège dans le milieu fédéral puis je me suis grandement investie dedans et le sport est rapidement devenu incontournable pour moi.

 

Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

Je suis originaire de l’Ardèche. J’ai effectué une partie de mon collège puis de mon lycée dans la région lyonnaise, au sud de Lyon précisément, jusqu’à l’obtention d’un BAC D, anciennement BAC S Option SVT. Je suis ensuite partie faire mes études à Clermont-Ferrand, à l’Université Blaise-Pascal, car à l’époque il y avait encore les concours d’entrée dans les UFR STAPS. J’ai obtenu mon CAPES en 1997 avant de partir une année dans l’Aine, puis quatre ans à Paris et depuis 2003 je réside dans le Poitou-Charentes.

 

Vous êtes professeure d’EPS au Collège Camille Claudel Civray. Pourquoi avoir choisi de travailler dans l’enseignement et pouvez-vous nous parler de votre métier ?

Cette envie est venue de mes années collège et lycée, via la chance de rencontrer des personnes qui m’ont fait aimer l’activité EPS. Si je n’avais pas été professeure d’EPS, mon deuxième choix aurait été professeure des écoles, car cette envie de travailler avec des enfants fait partie de moi. Je n’ai eu que cette orientation et c’est une chance de pouvoir vivre cela car c’est vraiment un métier que j’aime beaucoup. J’étais également beaucoup investie au niveau associatif, dans l’encadrement des jeunes, en tant que jeune entraîneuse dans un club de gymnastique, tout au long de mon lycée et de ma FAC. 

 

Quelles sont, selon-vous, les qualités pour être professeur d’EPS et quelles perspectives voyez-vous pour ce métier ?

 Pour moi, avant tout, et c’est encore plus fort ces dernières années et pour les années à venir, ce n’est pas de former de jeunes sportifs en leur apportant des techniques pour qu’ils deviennent plus performants. Notre métier est de faire grandir les jeunes, leur apporter des billes et leur apprendre à être les citoyens de demain par des valeurs de responsabilisation. Les activités physiques sont utilisées pour atteindre d’autres objectifs. C’est ce que nous avons appris à la FAC mais tout cela fait écho en moi et d’autant plus depuis quelques années où, à mon sens, les élèves ont un besoin éducatif qui est fort. A Civray, nous sommes dans un milieu social défavorisé pour une grande partie des familles, un milieu rural où l’on ressent vraiment ce besoin d’encadrement des jeunes. Nous sommes des éducateurs proches des familles et on ne peut octroyer le fait qu’en EPS nous allons porter cela, qui fait intégralement partie de mon enseignement. Pour la question des perspectives, le monde de l’éducation est difficile pour tout le monde car nous avons énormément d’enfants par classe, des postes sont perdus et chacun se demande ce que va devenir l’école. Pour moi, il faudrait investir plus de moyens chez les jeunes, afin de porter cette société future de meilleure manière, en rapport aux valeurs des citoyens que nous souhaitons former. En EPS, nous sommes tout le temps sur le qui-vive car nous ne savons si nous allons pouvoir perdurer, on apporte pas de savoirs proprement dit au niveau scolaire mais nous sommes plus dans cette formation de l’élève, du citoyen. Nous ne savons pas vraiment comment nous serons mangés plus tard. En UNSS notamment, nous perdons des postes chaque année et cela nous pose question car on se dit que l’UNSS est vraiment le Pôle sportif scolaire et nous avons de moins en moins de moyens. Rien que pour le District Sud-Vienne, nous avons perdu énormément de postes sur les dix dernières années.

 

Pouvez-vous nous parler de vos missions auprès de l’UNSS et comment s’organisent-elles sur l’année ?

 Nous sommes dans un collège qui est extrêmement investi en UNSS. Nous sommes trois professeurs d’EPS et l’UNSS est notre deuxième métier. Nous avons énormément de licenciés au niveau de l’établissement et nous sortons une cinquantaine d’élèves tous les mercredi. Notre politique du Sud Vienne est un Pôle fort de l’animation où les huit établissements du District se rencontrent chaque semaine et nous sommes seulement deux fois dans l’année dans notre établissement à faire un entraînement. Nous nous rencontrons sur ce pôle ou sur un pôle plus compétitif sur des activités comme l’athlétisme, les sports collectifs, les RAIDS, les CROSS qui sont des moments phares et s’organise autour de cela tout un Pôle Animation pour que les élèves puissent partager ensemble, vivre des expériences, prendre du plaisir. Au niveau du collège, nous avons créés une dynamique il y a plusieurs années. Nous avons des élèves qui sont très investis, qui viennent aux finales autant pour les activités que pour les copains. Ils nous font confiance et si on leur dit de venir car ça va être super, ils le font et c’est aussi gratifiant de voir cette confiance en nous. Nous avons un axe très fort qui est le Sport Partagé, qui a été accentué depuis que Mathias Magnain est arrivé au sein de notre établissement car il avait cette sensibilité là et ce regard différent sur le handicap. On ne pourrait plus voir l’UNSS sans le Sport Partagé. Par exemple, quand on voit la mixité obligatoire en course d’orientation, c’est très bien. Ce sont des valeurs propres à l’UNSS. La formule de CROSS a changé également, avec des équipes filles-garçons pour être sélectionné aux ACAD. Tout comme la mixité, nous avons ce Pôle Sport Partagé qui est fort. Nous avons une SEGPA dans nos murs, avec plusieurs élèves qui ont des dossiers MDPH et nous avons pu créer cette dynamique là et les enfants sont très investis, il ne se passe plus une activité où l’on emmène pas en parallèle à nos classes de collège des classes en Sport Partagé. La particularité de notre collège également est que ce développement du Sport Partagé s’est fait parallèlement à une sensibilisation du handicap dans notre établissement. Le déclencheur a été il y a trois ans, où nous avions un élève qui était en hypertrophie dorsale et certains élèves ont voulu le redresser, ce qui aurait pu être dramatique pour lui. Nous avons réfléchi à sanctionner ces élèves qui ont eu un rapport mauvais au handicap ou essayer de les sensibiliser, les former et sur cet axe nous effectuons pour la quatrième année une sensibilisation sur tout le niveau cinquième. Chaque année nous avons un thème : les sportifs de haut-niveau, la lecture en braille, le langage des signes, etc. Cela va de pair avec les activités pratiquées en UNSS et rentre dans les mêmes objectifs.

 

Le collège Camille Claudel Civray a obtenu des résultats exceptionnels, notamment en Sport Partagé.

L’année dernière, nous avons été vice-champions de CROSS en Sport Partagé avec quatre élèves. Nous avons fait le Championnat de France d’Escrime à Buxerolles, où nous étions les seuls en Sport Partagé donc le classement est faussé mais le projet articulé était d’emmener Théo, notre élève atteint d’autisme. Nous avons fait un énorme travail avec lui. Ensuite, nous sommes partis au Sport Partagé multi-activités, où on a terminé Champions de France. C’était magique, des moments forts car en plus nos élèves se sont entraînés toute l’année ensemble donc nous avions vraiment cette cohésion qui a provoquée des émotions qui nous ont suivi pendant des semaines. C’était pour moi une aventure unique. Il faut savoir que nous n’avons pas forcément emmené les mêmes élèves sur les activités. En CROSS et multi-activités, nous avons réussi à les valoriser. Cette année, nous avons disputé les Championnats de France de CROSS et nous sommes champions avec deux élèves identiques à l’année dernière puis deux nouveaux élèves dont une en situation de handicap. Après une première place aux ACAD multi-activité, nous partons aux Championnats de France à Laval au mois de mai. Nous disputerons également les Championnats de France de SP natation. Il y a deux ans, nous avions terminé quatrièmes à ce Championnat de France de natation, comme en Sport Partagé multi-activités.

 

Le sport est un miroir sociétal mais surtout un élément pacificateur. Quel est votre ressenti sur la place de la femme dans la société et la place que le sport occupe chez la femme ?

 J’ai l’impression que les femmes font plus de sport qu’auparavant, notamment par l’accès à la course à pied et toutes les activités annexes comme la zumba, tout ce qui est pilates, etc. Ce sont des formes de pratiques plus douces, pour les pilates. Il y a également des formes de yoga. Cela a donné accès au sport à une catégorie de personnes qui était moins touchée avant. La course à pied, les RAIDS, les TRAILS, qui sont à la mode en ce moment, ont vu la participation des femmes réellement augmenter.

 

Pour finir, comment faire pour qu’un sport féminin soit aussi beau qu’un sport masculin ?

 Je pense qu’il est aussi beau mais pas autant médiatisé. Les performances féminines ne sont pas moindres que celles des garçons, même si nous n’avons pas forcément la même force physique. Mais il ne faut rien négliger et les performances sont tout aussi fidèles que celles des garçons. 

 

Propos recueillis par Ivan GADAY.

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