Interview de Rima Cambray

Rima Cambray est la seule femme Vice-Président du CROS Nouvelle-Aquitaine. Détentrice de nombreuses casquettes, elle revient pour nous sur son parcours et ses différentes missions, en particulier celle de l’égalité hommes-femmes.

 

Rima, pour commencer, comment est né votre rapport au sport ?

 J’étais assez sportive étant jeune, notamment via ma pratique de l’équitation. J’ai ensuite fait du sport d’entretien durant mes études universitaires, car ce n’étant pas évident à Paris. En devenant maman, j’ai déménagé et je suis rapidement entrée au bureau du club des nageurs, car ils cherchaient du monde. Après, toutes mes prises de responsabilités ont toujours démarré en suivant mes enfants dans chacun de leurs sports.

 

Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

J’ai été Présidente du club des nageurs puis responsable au club de ski nautique. J’ai occupé diverses fonctions, avant de prendre la Présidence du club de hockey, ce qui était rare car il n’y avait que deux femmes Présidentes de clubs à la Fédération de Hockey. J’ai en parallèle intégré le Conseil d’Administration de la Fédération de Hockey, qui souhaitait féminiser ses effectifs. J’ai également été au Conseil d’Administration de la Fédération de ski nautique. C’était assez intéressant car cela donnait un regard sur des pratiques de mises en place différentes, et reste enrichissant autant pour moi que pour les structures. A l’époque, le Président du ski nautique Limousin m’a demandé d’entrer au CROS, pour représenter ce sport. J’avais la chance d’être mère au foyer par rapport par exemple au bénévolat, où il est plus difficile de trouver des femmes plutôt jeunes disposant de temps à investir dans la dirigeance. Je ne suis malheureusement pas sûre que l’on puisse dupliquer mon cas de ce fait actuellement. Pour autant, il faut trouver des moyens pour amener d’autres dames à pouvoir exercer des rôles compatibles avec leurs vies de familles. C’est une réalité sociétale. J’ai fait trois mandats au CROS et suite à la fusion je suis devenue Vice-Présidente du CROS de Nouvelle-Aquitaine, en charge du sport, éducation et citoyenneté. Parmi les orientations du CNOSF il y a la mixité, le handicap, la citoyenneté, les valeurs de l’olympisme, etc.

 

Pouvez-vous nous parler de vos missions rattachées au titre que vous avez au CROS par rapport au pôle sport, éducation et citoyenneté ?

J’ai fait partie de la liste présentée par le Président, via la demande du hockey sur glace. Je suis une femme et c’est un sport olympique, donc cela remplissait les conditions qui sont imposées par les statuts transmis par le CNOSF. Je suis l’une des quatre Vice-Présidents au CROS et la seule femme. Il y a quatre volets du plan sport et territoire du CNOSF : sport et citoyenneté qui est le mien, sport santé, sport et professionnalisation puis enfin sport et politique. Ma mission est donc de faire vivre les actions décidées, ce qui est un réel challenge car le territoire est extrêmement vaste. Nous avons créé un Conseil des Présidents pour que le CROS et les CDOS travaillent ensemble. Le CROS est à l’écoute des Fédérations avec lesquelles nous choisissons des thèmes. Par exemple, là, nous avons la création du réseau des dirigeantes qui a été validé pour la féminisation. Le CROS s’appuie sur ses chargés de mission, qui forment des ateliers avec les élus des CDOS sur diverses thématiques pour que tout le monde avance ensemble. Il faut s’enrichir de ce que chacun a pu faire pour le partager, ce qui a été long. Le but est de mettre tout cela en commun pour au final que nous ayons une politique qui couvre le territoire. Nous sommes une grande commode qui ouvre des tiroirs où chacun peut trouver ce qui va répondre à ses besoins.

 

Vous êtes également Présidente Générale du Comité Directeur de l’ASPTT Limoges.

C’est tout nouveau. J’ai été élue Présidente de l’ASPTT Limoges en novembre dernier, suite au départ de l’ancien Président. L’ASPTT représente tout de même 3.500 adhérents, soit le plus gros club de la Haute-Vienne. Il y a dix-neuf sections et quatorze salariés. C’est une grosse mission. J’espère pouvoir m’en acquitter et faire en sorte que toutes les sections arrivent à trouver leur place. Nous avons commencé par écrire le nouveau projet de l’Omnisport. Je suis heureuse de constater qu’il y a beaucoup de dirigeantes. L’ASPTT est une maison mère avec de nombreux services : comptabilité, gestion, gestion du personnel, etc. Là encore, le but est de créer un projet commun pour fédérer autour de nous car certains savent qu’ils pratiquent leur sport mais pas forcément qu’ils appartiennent à un Omnisport. Ce peut être enrichissant pour tout le monde. Par ailleurs, et j’en suis assez fière, j’ai été nommée par le CROS au CESER et c’est extrêmement enrichissant. Je suis dans ce cadre Vice-Présidente rapporteur de la commission aménagement du territoire et mobilité. Je tente d’insuffler de la vie sportive dans toutes ces réflexions pour que le sport soit partie prenante. Cela est dû au fait de la parité. Je pense, après plusieurs années de travail sur moi-même, être à ma place. Les jeunes dirigeantes doivent prendre conscience qu’elles ont toute leur place, légitimité et compétence. On attend également plus de nous. J’ai eu la chance de suivre une formation, via l’inscription par la Fédération de Hockey, ERASMUS et sport, dédiée à la dirigeance au féminin dans les instances fédérales ou européennes. Cette formation entre Paris et Rome se composait de cours en anglais sur la gestion : marketing, ressources humaines, management … et concernait six pays, représentés chacun par huit femmes. Je ne suis pas sûre que beaucoup d’hommes aient dû faire ce type de formation pour valider une compétence de dirigeance. Il faudrait repenser le mode de dirigeance, c’est-à-dire qu’on ne peut plus dire qu’une réunion va durer trois heures, car cela peut effrayer de jeunes mamans, qui du coup ne viennent pas. Il faut travailler pour arriver à trouver des solutions.

 

Vous êtes l’ancienne Présidente de FEMIX.

Je suis désormais trésorière. En fait, il s’est trouvé qu’il y avait des actions à mener par rapport à la création d’un réseau, etc. A l’époque, le CROS Limousin n’a pas souhaité créer de section femmes et sport, d’où la création de FEMIX. Actuellement, dans les axes de travail du CROS, la féminisation des instances, du réseau est importante. La mission de FEMIX va être portée par le CROS pour ne pas avoir deux entités différentes qui font la même chose et ne pas brouiller le message. En attendant, nous avons fait cinq trophées, travaillé sur les statuts des ligues, effectué une formation pour les dames qui souhaitaient devenir dirigeantes, donc des actions à notre niveau. Je pense que cela prendra plus d’ampleur avec le CROS car il y aura beaucoup plus de personnes pour s’investir. FEMIX National a bien entendu le fait que nous allions arrêter l’association, par contre il y aura des ambassadeurs et ambassadrices FEMIX pour la Nouvelle-Aquitaine qui continueront ce travail par rapport à la thématique. On travaillera en complémentarité. Par exemple, on ne fait pas les formations de FEMIX mais nous allons faire appel à FEMIX pour trouver des passerelles. C’était trop petit pour l’ampleur de la tâche à réaliser donc il vaut mieux un appui sur les CDOS via le CROS pour petit à petit amener des actions. Au niveau régional, il y a la conférence territoriale du sport lancée il y a deux ans, beaucoup de thématiques ont été retenues sur cet axe et si tout le monde faisait la même chose cela devenait compliqué.

 

Le but de cette newsletter est de tendre vers une unicité. Quelle est selon vous la place du sport chez les femmes et la place de la femme dans le sport ?

Je pense que le sport est un vecteur de socialisation qui aide pas mal de jeunes femmes qui sont chez elles, qui tentent d’avoir un enfant, les jeunes pour l’image de leur corps, etc. Cela peut amener beaucoup de choses à chacun. Maintenant, il faut trouver le bon créneau et les bonnes méthodes pour leur permettre, si elles le veulent, de faire du sport. Ce qui n’est pas forcément facile à agencer pour chacun. On s’achemine désormais bien plus vers du sport en solo et il faudrait que le club sportif redonne un intérêt à venir vers lui en proposant, au-delà du sport, de la convivialité. Un certain nombre de femmes recherche toutes ces notions et ne les retrouve pas forcément dans les clubs, donc elles n’y vont pas car elles ont le sentiment que les clubs ne vont leur faire faire que de la compétition. J’aurais un bémol sur la question car, malheureusement, par rapport au sport de haut niveau, la médiatisation de la femme sportive n’a pas encore les mêmes lettres de noblesse que celle des hommes. Pourtant, elles ont souvent une triple vie : la vie de famille, la vie professionnelle et la vie sportive. Il manque encore ce petit déclic, excepté pour de rares sports, qui va faire que celle qui a réellement envie d’être à haut niveau va mettre tout les moyens pour arriver à cela.

 

On peut constater que de plus en plus de femmes sont présentes dans le monde du sport mais ce n’est encore ni suffisant ni égalitaire.

Il y a onze femmes Présidentes de ligues en Nouvelle-Aquitaine sur cent ligues. Après, est-ce que des femmes souhaitent être présidentes, c’est un autre débat. C’est un chiffre brutal mais néanmoins, si d’autres femmes avaient envie, il faudrait qu’elles puissent y aller. Il y a peu de ligues qui n’aient intégré dans leurs statuts la notion de la loi sur l’égalité hommes-femmes ou les articles du Code du Sport qui rebâtissent à la parité dans les instances dirigeantes. Il reste encore du chemin car il faut savoir qu’il n’y a pas d’obligation au niveau régional et encore moins départemental d’intégrer ces textes, qui s’arrêtent aux Fédérations. Je ne sais pas si obliger par quota est une bonne chose, néanmoins cela produit des effets. Pour que ces effets soient pérennes, il faut trouver des solutions pour que ces femmes, comme les jeunes hommes d’ailleurs, puissent accéder plus facilement à cela. Il faut que les instances et le bénévolat se remettent en question d’une manière générale pour aller dans le sens d’un rajeunissement car sinon un jour cela deviendra problématique et on peut perdre nos bénévoles.

 

Pour finir, comment faire pour qu’un sport féminin soit aussi beau qu’un sport masculin ?

Il n’y a pas besoin de faire plus, il ne faut pas comparer les deux ! Il y a de très bonnes athlètes féminines qui font de super choses. Chaque sport est beau à voir, on voit aussi par les audiences que de plus en plus de monde regarde, se rencontre dans le cadre de voir du sport, du beau sport et il ne faut pas les renvoyer l’un contre l’autre car cela n’a rien à voir. Une femme n’est pas un homme au sens physionomique. C’est incomparable. Pour le Tournoi des Six Nations, les femmes terminent troisièmes et ont un encart dans l’Équipe et les hommes six pages pour leurs résultats. Il faut que cela évolue. La finale de handball, par exemple, a rassemblé plus de onze millions de téléspectateurs, c’est très intéressant. Je pense que la Coupe du Monde de football féminin en France sera un vrai virage car ce sport a les moyens de propulser le sport féminin.

 

Propos recueillis par Ivan GADAY

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